En collaboration avec Föhn, nous avons accueilli et accompagné le groupe de recherche d’Atravessar pendant le premier volet de cette résidence croisée à Bordeaux. Après deux semaines de recherche au Capc musée d’art contemporain de Bordeaux et une escale à la Rochelle au Centre Intermondes, le quatuor a poursuivi ses recherches au Musée d’Aquitaine.
La fin de ce premier volet de la résidence croisée a été marquée par plusieurs temps de partage et de transmission des pensées et réflexions de la curatrice et chercheuse Daniela Labra et de l’artiste Gê Viana.
Avant de s’envoler pour le Brésil où Elise Girardot et Erwan Venn poursuivent les recherches dans le second volet de la résidence Atravessar, retour sur ces moments !
Une causerie AU musée d’aquitaine
Les rapports critiques de l’art brésilien contemporain avec son passé colonial
Lors de cette causerie qui s’est tenue dans la salle de la Rosace au Musée d’Aquitaine, Daniela Labra a esquissé l’évolution de l’art brésilien de la période moderne et contemporaine, commentant la représentation des populations non blanches et la critique des processus coloniaux à travers les œuvres, dont celles de l’artiste présente à ses côtés, Gê Viana. Puis, Gê Viana a présenté son travail à travers une sélection de photomontages et de collages réalisés au Brésil mais aussi lors de sa résidence à Bordeaux. Elle est revenue sur Atravessar et ce temps de résidence entre Bordeaux et La Rochelle, sur les recherches qu’elle y a menées, et elle tenait à nous rappeler que les images ont le pouvoir de transformer et de marquer les époques autant que de les détruire. Se faisant, sa présentation s’est muée en performance. Tout en lisant un texte qu’elle avait écrit, Gê Viana a commencé à s’appliquer sur le visage du Rocou (fruit rouge à épines remplis de graines non comestibles), utilisé traditionnellement depuis des millénaires par les tribus autochtones d’Amazonie pour se teindre la peau. Ce geste symbolique permet alors à Gê Viana de se purifier des crimes commis par les colons, présents et passés, et des émotions qui l’ont traversé durant son séjour.
Un atelier de pratique artistique au collège du grand parc
Lors d’une intervention dans un cours d’histoire-géographie, Gê Viana et Elise Girardot, ont expliqué aux élèves de 4ème du collège Clisthène, annexe expérimentale dans les locaux du collège Grand Parc, le projet de la résidence croisée Atravessar et le travail de Gê Viana qui mêle différentes images d’archives, celles de sa famille d’ascendance afro-indigène et celles qui illustrent et écrivent l’Histoire du point de vue des colons. Gê Viana leur a montré comment avec des découpages, des photomontages et collages, elle écrit une autre histoires, comment elle déplace le point de vue, les idées reçues, comment elle transforme un passé d’oppression en vision de célébration et d’amour. Les élèves ont ensuite eux aussi expérimenté cette méthode : ils se sont emparé d’images collectées dans d’anciennes revues, des livres d’histoires, des cartes géographiques, pour réaliser des collages figurant leur histoire familiale, problématisant les questions liées à leurs origines, aux conquêtes coloniales et aux mouvements migratoires. L’atelier a été organisé avec l’aide de Manon Mainbourg, professeure d’histoire-géographie et de Nadine Coussy Clavaud, professeure d’arts-plastiques.
Des collages à sainte-croix et aux chartrons
Gê Viana a réalisé deux collages dans les rue de Bordeaux ; ils résonnent avec le passé colonial de la ville, crée une présence indigène à Bordeaux et incarne les allers-retours d’Atravessar.
Rue Rode, Quartier Chartrons
Gê Viana a opéré une mise à jour historique d’après une lithographie de Jean-Baptiste Debret, en 1837, Cabocle (Indien civilisé) dans le Voyage pittoresque et historique au Brésil. Elle fait un pied-de-nez à la pensée de Jean-Baptiste Debret, qui dévalorisait l’utilisation du tir à l’arc comme une technologie dépassée au regard de celle des européens.
Rue du Port, Quartier Sainte-Croix
Gê Viana rend ici hommage à Karapiru. Karapiru est né dans une tribu nomade de chasseurs-cueilleurs de l’Amazonie, les Awás, à la fin des années 1940. À cette époque, le monde extérieur n’avait quasiment pas posé le pied sur les terres ancestrales des Awás, qui s’étendait sur une bonne partie du Maranhão au Brésil. A partir des années 1960, nouveaux arrivants, exploitants agricoles et miniers envahirent progressivement le territoire des Awás. Ces colons chassèrent les Awás de leurs terres avec des armes, les tuant. Karapiru et sa famille furent attiré dans un guet-apens. Seul rescapé de ce massacre, Karapiru a fui seul pendant une dizaine années, à travers les plateaux du Brésil. Il finira par retrouver après sa longue errance solitaire, une communauté d’Awás, avec qui il passera le reste de sa vie. Karapiru est décédé en 2021 de la COVID-19. Karapiru incarne la résilience des populations autochtones brésiliennes face à la souffrance causée par les colons et à leur cruauté. Son histoire résonne toujours dans le Brésil contemporain, celui de Bolsonaro. Le président Jair Bolsonaro et son corps législatif redoublent d’efforts pour revenir sur les lois protégeant les territoires autochtones. Les chefs autochtones craignent que les tribus isolées comme les Awás soient à nouveau confrontées à une vague de confiscation violente de leurs terres.
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